L’éducation positive en 10 conseils
Retrouvez cet article publié dans la revue Le Cercle Psy .
Bienvenue dans le monde (merveilleux) de l’éducation « positive », dite éducation non-violente ou encore démocratique, un style éducatif qui s’enracine dans les données scientifiques actuelles dont la psychologie positive, développementale, comportementale, la théorie de l’attachement ou encore les neurosciences. Suivez le guide !
Son objectif est de dépoussiérer les modèles éducatifs autoritaires de nos ancêtres. N’ayez crainte, l’éducation positive n’a pas pour ambition de faire de vous des parents parfaits, ça n’existe pas (sauf peut-être chez la famille Ingalls de La Petite Maison dans la Prairie), ni d’assouplir les règles du quotidien. Non, l’objectif est de poser le cadre éducatif de manière non-violente, en phase avec les données scientifiques et des droits de l’enfant. Qui veut relever le défi ? En voici les 10 principales valeurs.
1) Identifiez les besoins insatisfaits
Identifier les besoins insatisfaits d’un enfant (besoin de repos, de manger, de calme, de mouvement, de connexion avec l’adulte…) permet de proposer une réponse plus adaptée et ainsi de limiter la fréquence des comportements « inadaptés » comme les crises de colères, les manifestations d’agressivité verbale ou physique. C’est un peu comme si, face à une casserole de lait bouillant, on pensait à baisser l’intensité du gaz plutôt que de mettre un couvercle !
Attention car les envies (envie de chocolat) se distinguent des besoins (besoin de manger). Or, l’éducation démocratique vise avant tout à satisfaire les besoins de l’enfant, et non ses envies.
2) Ne réagissez pas à chaud
En situation de crise, au lieu de répliquer sur le vif et d’entrer dans une escalade conflictuelle de violences, octroyez-vous une pause. S’il ne vous est pas possible de vous isoler, vous pouvez compter jusqu’à 10 ou vous adonner à quelques respirations abdominales. Cette prise de distance (physique et psychique) permet de se déconnecter de ses émotions pour se reconnecter à son raisonnement, et proposer ainsi une réponse plus pédagogue. « Ok, tu vois, je suis moi-même très en colère. Je te propose d’en rester là pour le moment, de faire une petite pause, et de reparler de ce problème quand nous serons tous les deux calmés ».
3) On évite les punitions
Si les punitions permettent aux parents, sur le moment, d’asseoir leur domination et ainsi de se soulager, elles n’ont aucune portée pédagogique pour l’enfant. Non seulement elles perdent progressivement leur effet dissuasif et elles détériorent la relation entre l’enfant et l’adulte, mais surtout elles n’apprennent pas à l’enfant à agir autrement. A l’instant T, quand votre enfant a un comportement inadapté, apprenez-lui le comportement positif opposé, c’est à dire ce que vous souhaitez qu’il fasse. Par exemple : si votre enfant vient d’arracher un jouet des mains d’un autre enfant, apprenez-lui à demander le jouet au lieu de l’arracher, montrez- lui comment faire. Lorsqu’il a le bon comportement, encouragez-le (ce que les psychologues appellent le renforcement positif) pour augmenter la fréquence de ce comportement adapté (demander le jouet) et diminuer la fréquence du comportement inadapté (arracher le jouet).
4) Encouragez et valorisez
« L’encouragement est à l’enfant ce que l’eau est à la plante », soulignait Rudolf Dreikurs, psychiatre autrichien. Les encouragements et la valorisation sont pour les enfants – comme pour les adultes – un puissant moteur, une sorte de nourriture affective qui permet de développer son estime de soi, la confiance en ses compétences et ainsi de poursuivre ses efforts. « Tu as très bien révisé ton contrôle de maths ce week-end, quelle que soit la note que tu obtiendras, tu peux être fier de toi ! »
5) Faites des câlins préventifs
Les temps de tendresse permettent de diminuer le stress de l’enfant et d’accroître son sentiment de bien-être. N’hésitez pas à lui en proposer un dès que vous le sentez nerveux, agité ou fatigué, après une longue journée d’école par exemple voire, pourquoi pas, au cours d’un conflit qui vous oppose. Sa réaction pourrait vous surprendre ! « Je sens que cette journée d’école t’a beaucoup fatigué… Et si on prenait le temps tous les deux de se faire un gros câlin histoire de recharger les batteries avant de préparer le dîner et de jeter un œil aux devoirs ? ».
6) Laissez-lui une petite marge de manœuvre
Au lieu d’imposer votre choix à l’enfant (ce qui risque d’entraîner un refus de sa part), il est plus stratégique et porteur de lui donner un choix limité afin qu’il fasse l’expérience du pouvoir et qu’il mobilise son raisonnement. Le fait de donner le choix à l’enfant est identifié par les travaux de recherche comme un « antécédent favorable » qui va augmenter le degré de coopération de l’enfant. « C’est l’heure de partir à l’école, tu préfères y aller avec tes sandales vertes ou tes chaussures rouges ? C’est toi qui décides ! ».
7) Montrez l’exemple
Les adultes sont les premiers modèles sociaux-émotionnels de l’enfant. Veillez à contrôler vous-même votre comportement et à montrer l’exemple : verbalisez vos émotions, ne cédez pas à la colère, ni à la violence physique ou verbale : « Là, tu vois, je suis triste et sans doute un peu découragé parce que tu n’as pas voulu goûter le plat que je t’ai préparé alors que j’espérais tellement te faire plaisir ! ». Si vous avez trop de difficultés à réguler votre propre émotion, il peut être intéressant dans certains cas de demander conseil à un professionnel.
8) Soyez empathique
Faites preuve d’empathie en exprimant à l’enfant que vous avez compris ce qu’il ressent, tout en gardant en tête que comprendre une réaction ne signifie pas l’excuser. L’enfant qui se sent écouté parviendra mieux à vous écouter par la suite. « Je sais que tu es très en colère parce que ta sœur t’a pris ce camion rouge, ton jouet préféré… Pour autant, tu n’as pas le droit de la frapper, tout comme elle n’a pas non plus le droit de te frapper, c’est interdit ! ».
9) Accordez-lui un temps quotidien d’attention
Prévoyez, chaque jour, un temps entre 10 et 30 minutes (en fonction de son âge et de
ses capacités attentionnlles) au cours duquel vous lui consacrerez toute votre attention, rien
qu’à lui, sans répondre au téléphone ni aux sollicitations de ses frères et sœurs. Ce peut être
un temps de lecture, de chansons, un moment où l’on se raconte sa journée passée, ses temps forts, ses émotions ressenties, etc.
10) Faites preuve d’humour !
L’humour permet d’apporter de la légèreté au quotidien et aux problématiques traversées. Apprenez à votre enfant à sourire ou à rire de nombreuses situations épineuses : « Je suis le loup-garou qui dévore tous les enfants qui laissent traîner leurs chaussettes sur le canapé ! » ou encore « Tu veux frapper ton frère ? Et si tu le transformais plutôt en un crapaud rigolo avec une peau toute verte et de grandes pa-pattes ? ». Bien entendu, rappelez- lui que certains événements nécessitent d’être traités avec sérieux !
Attention ! Tout ce que l’on vient de se dire est un idéal éducatif vers lequel on doit tendre au quotidien. Cependant, il ne faut pas oublier qu’il existe un fort décalage entre la théorie et la pratique, entre le parent idéal que l’on souhaite devenir et le parent que l’on est en réalité. Ce décalage est normal. Aucun parent n’est parfait. Faites de votre mieux sans vous imposer une pression monumentale, ce sera déjà un bon début. Et si jamais vous vous sentez trop en difficulté dans votre vie de parent, n’hésitez pas à consulter un professionnel. Que la force soit avec vous !
Héloïse Junier
Pour aller plus loin :
Guedeney, N., L’attachement. Un lien vital, Fabert, 2011.
Junier, H. (2022). Manuel de survie des parents. Décrypter et accompagner l’enfant de 0 à 6
ans. Dunod.
Junier, H. (2021). Ma vie de bébé. De 0 à 3 ans, les mystères de son petit cerveau en
développement. Dunod.
Junier, H. (2023). Ma vie d’enfant. Des clés pour accompagner mon enfant de 3 à 10 ans.
Dunod Graphic.
Kazdin, A. (2023). Eduquer sans s’épuiser ! Les outils pour une éducation positive qui pose
des limites.
Serres, J. et Schuhl, C. (2015). Petite enfance: (Re)construire les pratiques grâce aux
neurosciences. Chronique sociale.
Serres, J et Fontaine, A-M. (2020). Et si on revisitait certaines idées sur les jeunes enfants ?
Chronique sociale.